Mise en place d’un suivi de qualité de l’eau en baie de l’Aiguillon

Le contexte

À l’interface continent-océan, la baie de L’Aiguillon reçoit d’importants apports de nutriments et de matière organique depuis le continent, et échangent de grandes quantités de matière et d’énergie avec l’océan. Cette zone côtière reçoit notamment les eaux douces de près de 6350 km2 de bassin versant provenant des quatre départements de la Charente-Maritime, des Deux-Sèvres, de la Vendée, et pour une faible partie de la Vienne.

Ces apports terrestres plus ou moins réguliers aux plans quantitatif et qualitatif constituent l’un des facteurs clé du fonctionnement de l’écosystème, en contrôlant en partie la production primaire de la baie.

Il n’existait qu’un seul point de prélèvement géré par l’IFREMER dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) avec un pas de temps minimum de quinze jours au moment de la pleine mer (+ /- deux heures) et localisé sur la Sèvre niortaise (mesures de la salinité, température, nutriments, Chlorophylle a). Ce dispositif ne permettait donc pas de prendre en compte les apports potentiels d’eau douce à la baie. Aussi, les apports terrestres des différents bassins versants qui se jettent dans la baie de l’Aiguillon, notamment celui du Lay (via les canaux de la Raque et de Chenal Vieux), du Curé (via le canal du Curé) et de la Vendée (via le canal de Luçon) ne sont pour le moment pas étudiés.

Les apports issus du milieu marin et sous l’influence des grands fleuves régionaux contribuent également à la baie influençant d’une manière plus générale le fonctionnement des Pertuis charentais. Des mesures de salinité en continu au sein de cette zone côtière permettent par exemple de rendre compte de l’hétérogénéité des masses d’eaux influencées par ces différentes sources d’eau douce et marine. Les fluctuations de ces apports sont donc devenues une préoccupation en termes de gestion, de préservation du milieu et de son utilisation notamment par les professionnels de la pêche et de la conchyliculture.

Conscients de l’utilité d’une meilleure connaissance scientifique sur le fonctionnement de ces masses d’eaux côtières, et de l’insuffisance des moyens actuels dont ils disposent pour tendre vers cet objectif, les gestionnaires de la Réserve sollicitent l’IFREMER, organisme référent en termes de surveillance et d’observation des eaux littorales, pour les aider à mettre en place une étude scientifique adaptée et une aide à la maîtrise d’ouvrages (AMO).

Un suivi pas si simple…

La mesure de la qualité de l’eau est complexe prenant en compte une multitude de paramètres ou de molécules. La température et la salinité de l’eau sont des caractéristiques physico-chimiques majeures simples à mesurer permettant de rendre compte de l’hétérogénéité des masses d’eaux étudiées et influencées par les différentes sources.

Malgré l’existence d’un certain nombre de réseaux régionaux et nationaux mis en place par les différents services concernés (Etat, Conseils départementaux, IFREMER), les apports d’eau douce notamment du point de vue qualitatif mais aussi quantitatif (apports massifs et non prévisibles en période de crue par exemple) ne peuvent être pleinement appréhendés que par l’existence d’un suivi à haute résolution spatiale et temporelle (à noter qu’en parallèle de cette étude financée par le LIFE, une étude sur les volumes d’eau apportés à baie de l’Aiguillon est réalisée par l’Etablissement public du Marais poitevin).

Sortie en bateau sur la Sèvre niortaise © Réserve naturelle nationale de la baie de l’Aiguillon

Les actions

Dans le cadre du LIFE, il est proposé :

1 – de pérenniser la présence de trois points de mesure par sondes multi-paramètres (température, salinité, turbidité, chlorophylle) en continu au niveau de la baie (bouées Sèvre et Lay) et du Pertuis breton (Filière). L’entretien de ces sondes, plus financé au début du projet LIFE, ne permet pas de conserver cet outil de mesure pourtant indispensable.

2 – d’installer des sondes complémentaires de mesure de température et salinité au niveau du Chenal Vieux, du Canal de Luçon, du Canal de la Raque et du Canal du Curé. Ces outils installés au niveau du bassin versant permettront de mesurer les variations de ces masses d’eau en termes de température et salinité susceptible de fournir des éléments quant à la distribution de certaines espèces de poissons et oiseaux et aussi quant à l’influence de ces apports terrestres sur la baie.

De manière générale, il est proposé un conventionnement entre les gestionnaires de la Réserve de la baie de l’Aiguillon et l’IFREMER.

L’IFREMER apportera son expertise sur le choix du matériel, la validation du système, et la métrologie associée et validera la mise en place technique des sondes complémentaires pour les mesures de température/salinité ; les gestionnaires de la réserve contribueront à long terme au fonctionnement des stations de mesure et au recueil des données (formation nécessaire). Les deux organismes, dans le domaine de compétence respectif, analyseront et publieront les résultats issus de ces mesures.

Ainsi, à l’issue du programme LIFE, un observatoire valide de la qualité de l’eau (paramètres physico-chimiques évoqués ci-dessus) sera mis en place. Il permettra de mieux comprendre l’hétérogénéité spatio-temporelle des masses d’eau du bassin versant et son influence possible sur le fonctionnement de la baie de l’Aiguillon.

En sus de ces mesures physico-chimiques en continu, des mesures discrètes (prélèvement d’eau à partir de bateau au minimum tous les quinze jours) de certains paramètres hydrologiques (matériel particulaire, nutriments minéraux et organiques dissous et paramètres du système des carbonates) sur les cinq émissaires principaux du bassin versant et les trois points côtiers décrits précédemment seront réalisées afin d’étudier leur dynamique spatio-temporelle et de quantifier ces apports à la baie grâce aux mesures de débits en parallèle.

Ces apports terrestres plus ou moins réguliers aux plans quantitatif et qualitatif constituent l’un des facteurs clé du fonctionnement de l’écosystème, en contrôlant en partie la production primaire de la baie. Cette dernière conditionne ensuite les échelons supérieurs de la chaîne alimentaire et influera sur la répartition et l’abondance des espèces floristiques et faunistiques.

Au final, un seul objectif

La réalisation d’une telle opération permettra de mieux comprendre la dynamique des nutriments et du carbone au niveau des eaux des différents bassins versants ainsi que les apports terrestres qualitatif et quantitatif à la baie de l’Aiguillon susceptibles d’influencer son fonctionnement.

Cette opération constituera possiblement une aide à la gestion des politiques publiques amont. En outre, compte-tenu de l’impact de la gestion hydraulique sur de nombreuses activités économiques (conchyliculture, pêche côtière), cette action rapprochera certainement le monde des professionnels de la mer et la Réserve. Enfin il s’agit à terme, grâce à une éventuelle synergie d’action et à l’installation d’outils complémentaires (débitmètre), de mieux prendre en compte les besoins en eau douce du versant maritime du Marais poitevin et donc d’améliorer cette gestion.

Sèvre niortaise et mizottes de Champagné-les-Marais © Réserve naturelle nationale de la baie de l’Aiguillon


Etat d’avancement et résultats

Suivi de la température et de la salinité dans les chenaux, exutoires et en aval des fleuves.

Les sondes STPS (NKE) ont été mises en place en janvier 2017. Elles permettent les mesures en continu de température, salinité et pression au niveau du Chenal Vieux, du Canal de Luçon, du Canal du Curé, de la Sèvre niortaise et du Lay. Une première sonde a disparu en mer suite au passage de la tempête ZEUS du 6 mars 2017. Les sondes sur le  Chenal Vieux, le Canal de Luçon et le Canal du Curé ont été retirées en octobre 2020.

Changement d’une sonde sur la Sèvre niortaise.

A titre d’information, voici les résultats de salinité et de température obtenus sur les sondes du Lay (pont de l’Aiguillon-sur-mer) et du Canal du Curé pour le début d’année 2020. La température évolue de manière similaire sur les deux stations. Nous observons une augmentation graduelle de la température de l’eau entre janvier et juillet, avec une température moyenne d’environ 8°C début janvier et une température moyenne d’environ 24°C fin juillet.

En ce qui concerne la courbe de salinité, nous observons la même tendance entre les deux stations. La salinité fluctue beaucoup en début d’année, avec des augmentations ponctuelles, puis nous observons une augmentation graduelle de la salinité à partir de la mi-juin jusqu’à atteindre une salinité moyenne de 30g/L pour le Lay et 34g/L pour le canal du Curé. Les données de salinité et de température des différentes stations sont régulièrement transmises sur le site du LIFE Baie de l’Aiguillon et sont téléchargeables dans l’espace documents à télécharger.

Localisation des sondes STPS

 

Suivi des quantités d’eau

Des sondes de mesures de débit ont été acquises et mises en service en mars 2017 sur le Lay et sur la Sèvre niortaise par l’Etablissement public du Marais poitevin. Les résultats figurent dans le rapport Deborde Jonathan, Geairon Philippe et al. (2021) Implantation d’un réseau de mesures quantitatives aux principaux exutoires du Marais poitevin à la Baie de l’Aiguillon .

 

 

Analyse de la composition de l’eau en nutriments et en carbone sur deux années

En 2017 et 2018, des mesures hydrologiques ont été faites tous les 15 jours à marée basse sur les cinq émissaires principaux du bassin versant (Chenal vieux, Canal de Luçon, Canal du Curé, Sèvre niortaise, et Lay) et à marée haute sur trois points côtiers (bouées Sèvre et Lay et filière) par le Laboratoire de l’environnement et de l’alimentation de la Vendée.

Les principaux paramètres mesurés sont : la température, la salinité, l’oxygène dissous, le carbone dissous et particulaire, l’azote dissous et particulaire, le phosphore dissous et particulaire, les nitrates et phosphates, le pH et l’alcalinité de l’eau. A cela s’ajoutent depuis août 2017 des mesures phytosanitaires.

Les résultats de cette analyse figurent dans le rapport sur la Coignot E, Polsenaere P et al. (2020) Variabilité spatio-temporelle des nutriments et du carbone et flux associés le long d’un continuum terrestre-aquatique tempéré rédigé par l’IFREMER.

Sèvre niortaise (c) Quentin Gama

Prélèvement d’eau par le LEAV

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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