Une baie reconnue pour les oiseaux, mais pas que…
La baie de l’Aiguillon doit son classement en réserve naturelle de part les effectifs d’oiseaux d’eau migrateurs. Mais, elle reste d’intérêt pour de nombreuses autres espèces souvent moins connues.
Baie de l’Aiguillon : un hôtel restaurant connu et reconnu !
Le classement en Réserves Naturelles Nationales de la Baie de l’Aiguillon provient de son exceptionnelle richesse ornithologique. En effet, le littoral français représente une zone privilégiée sur la voie de migration est-Atlantique, et la baie de l’Aiguillon constitue un site de première importance pour les oiseaux d’eau, reflets directs de la richesse et de la qualité du milieu. Les oiseaux y trouvent quiétude et nourriture. Ainsi, ce site de valeur internationale accueille d’importantes populations de limicoles et d’anatidés en hivernage ou en escale migratoire.
Les limicoles
Les limicoles sont de petits échassiers fréquentant principalement les zones humides littorales. Ils sont typiquement de grands migrateurs. Ceux rencontrés dans la baie de l’Aiguillon voyagent depuis les régions du Groenland et de la Sibérie (où ils se reproduisent), jusqu’aux régions tempérées méridionales et intertropicales (où ils hivernent).
En janvier, on dénombre environ 45 000 limicoles, parmi lesquels les principales espèces sont :
- le Bécasseau variable,
- le Bécasseau maubèche (sous espèce issue d’Islande et du Groenland),
- l’Avocette élégante,
- la Barge à queue noire,
- la Barge rousse,
- le Pluvier argenté,
- le Courlis cendré.
La baie de l’Aiguillon est ainsi le premier site d’hivernage national pour la Barge à queue noire et l’Avocette et le second pour le Bécasseau maubèche. Elle joue également un rôle primordial lors des migrations prénuptiales (printemps) et post-nuptiales (automne) pour d’autres espèces : le Bécasseau maubèche (sous-espèce sibérienne), le grand Gravelot, le Chevalier gambette.
À marée basse, les limicoles en recherche de nourriture (mollusques et vers marins) se dispersent sur l’ensemble des vasières. Lorsque la mer monte, les oiseaux se concentrent sur les espaces de vasière restant disponibles.
A marée haute, lors de coefficients moyens, les limicoles se réfugient sur les prés salés alors que pour les grands coefficients, la baie étant submergée, ils sont contraints de rejoindre des zones de refuges hors réserve (zones humides continentales).
Les anatidés
La famille des anatidés regroupe les canards, les oies et les cygnes. Ces grands voyageurs viennent eux aussi passer l’hiver dans la baie, avec des effectifs qui varient entre 25 et 35 000 individus en moyenne.
Parmi eux les oies (Oie cendrée, Bernache cravant, quelques Oies rieuses et Bernaches nonnettes), qui fréquentent la réserve depuis octobre jusqu’à mars. Elles utilisent exclusivement les prés salés pour leur activité alimentaire, ces herbivores se nourrissant ici essentiellement d’une graminée, la Puccinellie maritime.
Il y a aussi les canards de surface (principalement le Canard colvert, le Canard pilet, le Canard siffleur et la Sarcelle d’hiver), présents plus de six mois consécutifs sur la réserve. Le jour, ils viennent se reposer majoritairement sur les vasières, le long des chenaux. Le soir, une partie d’entre eux va se nourrir sur les prés salés (notamment les siffleurs, herbivores) mais beaucoup quittent la baie pour s’alimenter la nuit dans les prairies humides du Marais Poitevin. Ce rythme d’activité illustre ici parfaitement la complémentarité et l’interdépendance qui existent entre la baie de l’Aiguillon et le Marais Poitevin.
Enfin, il faut citer le Tadorne de Belon, un canard côtier friand notamment d’Hydrobies et qui trouve en baie de l’Aiguillon un site d’accueil remarquable puisqu’elle héberge jusqu’à 18 000 individus en hiver et dont quelques couples se reproduisent en baie.
Les oiseaux nicheurs
On pourrait penser qu’en dehors des migrations, la baie de l’Aiguillon est moins intéressante pour les oiseaux mais il n’en n’est rien ! Ainsi, sur les prés salés et les dunes, différentes espèces d’oiseaux trouvent en ces habitats, de vrais sites de reproduction.
La Gorgebleue à miroir blanc se reproduira principalement dans les zones à Chiendent marin, soude maritime ou zones à grande Cigüe et Moutarde noire. L’Alouette des champs va quant à elle plutôt nicher sur les zones à Puccinellie maritime.
Le Gravelot à coller interrompu, un petit limicole, niche en haute de plage à la Pointe de l’Aiguillon. Sur la dune grise, on retrouvera d’autres espèces comme le Pipit rousseline, le Cochevis huppé, l’Alouette calandrelle !
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Quelques amphibiens s’y aventure…
La baie de l’Aiguillon et ses marais périphériques n’est pas forcément une zone réputée pour ses batraciens. On y retrouve principalement le Pélodyte ponctué, le Crapaud commun, la Rainette méridionale ou la Grenouille verte. En revanche, la restauration de milieux périphériques peut complètement favoriser leur présence.
Ainsi, sur la Prée Mizottière, une gestion des niveaux d’eau est susceptible de favoriser et de renforcer les populations de batraciens.
Une adaptation à des conditions de vie difficiles
La végétation des milieux littoraux est constituée essentiellement d’espèces halophiles, c’est-à-dire de plantes qui peuplent et tolèrent les sols salés. L’alimentation en eau de ces plantes est gênée par la présence de sel, elles en puisent donc le moins possible et doivent l’économiser.
On dénombre actuellement, sur l’ensemble de la Réserve Naturelle de la Baie de l’Aiguillon, 112 espèces végétales dont 69 sur les prés salés et les dunes.
Le schorre ou pré salé
Localement appelé « mizotte », le schorre ou pré salé est occupé par un tapis végétal dense caractérisé par une flore adaptée à la submersion régulière par l’eau de mer, lors des marées de fort coefficient.
- Limite vasière/schorre dominée par une végétation pionnière à Spartine maritime et à Salicornes annuelles.
- Bas schorre dominé par la Puccinellie maritime en association avec l’Aster maritime et l’Arroche hastée.
- Moyen schorre dominé par la Puccinellie maritime et les Salicornes annuelles dans les zones dépressionnaires.
- Haut schorre dominé par la Puccinellie maritime en association avec d’autres espèces herbacées (Orge maritime, Vulpin bulbeux) si entretien par la fauche. Moyen et Haut schorre dominé par le Chiendent marin ou l’Obione en absence d’intervention humaine.
La prédominance des prairies à Puccinellie maritime sur la réserve naturelle est le résultat du mode de gestion des prés salés. En effet, la fauche et le pâturage favorisent et maintiennent une végétation dominée par la puccinellie.
Une plante invasive est également présente sur les prés salés : la Spartine anglaise. Elle figure parmi les 100 espèces végétales désignées par l’UICN parmi les plus dangereuses pour l’environnement. Elle est une espèce invasive, c’est-à-dire introduite volontairement ou non en dehors de son aire d’origine. La Spartine anglaise Spartina anglica est une graminée très robuste, issue d’un hybride fertile entre S. alterniflora et S. maritima. Spartina alterniflora provient de l’Amérique du Nord et a été introduite accidentellement en Europe, à Southampton (Royaume-Uni) en 1829. Le premier hybride non fertile S. townsendii est apparu en 1870 mais n’a été reconnu comme tel qu’en 1956. Il a vite laissé la place à S. anglica considérée comme espèce par Hubbard en 1968.
Son fort pouvoir de colonisation s’explique par le fait qu’il suffit d’un jeune plant par m² pour coloniser rapidement une zone (Reeder et al., 2004).La Spartine anglaise Spartina anglica a été découverte en 1998 sur la baie de l’Aiguillon, lors de la première cartographie des prés salés et n’a cessé de progresser depuis. Par ailleurs, différents modes de lutte ont été testés, plus ou moins efficaces et pour certains d’entre eux, ayant des impacts non négligeable sur les habitats connexes.
Sur les rives de la Sèvre niortaise
On retrouve une végétation typique de pré salé mais la présence d’espèces conditionnées par les apports d’eau douce témoignent d’un passage vers un milieu saumâtre (confrontation d’eau douce et d’eau salée). De ce fait, on rencontre sur les bords de Sèvre des roselières à phragmites, à scirpes ou bien encore des zones dominées par le Jonc de Gérard.
Un zoom particulier peut être fait sur l’Oenanthe de Foucaud, endémique des estuaires de Charente et de Gironde, bénéficiant d’un statut de protection nationale et d’une inscription à la liste rouge du Poitou-Charentes. Plusieurs stations sont présentes sur la réserve sur les berges vaseuses et végétalisées soumises au balancement des marées de la Sèvre Niortaise.
La végétation des dunes
Cette végétation présente des adaptations communes à la végétation des prés salés. À la présence de sel, la végétation répond par le développement de plantes grasses, avec des feuilles et parfois des tiges charnues. Cette succulence se retrouve ainsi en haut de plage chez le cakilier maritime ou sur la dune chez le Liseron des sables.
De nombreuses espèces ont aussi un appareil souterrain très fortement développé (racines de 2 à 3 mètres), permettant un ancrage solide et une alimentation en eau, comme chez l’Euphorbe maritime ou l’Oyat.
Le sable coquiller calcaire
Il forme les dunes de la pointe de l’aiguillon permet l’apparition d’Orchidées, comme les très belles Ophrys abeille et Ophrys araignée.
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